de sa personne et pleine de majesté, et qu’elle avait une merveilleuse intelligence de ce qu’elle disait, il me parut qu’avec de bons conseils on pouvait en faire une excellente actrice ; et tombant ainsi d’une idée dans l’autre, je me mis en tête d’éprouver avec ces acteurs l’une de mes trop nombreuses tragédies. Je voulais m’assurer par moi-même s’il y avait chance de succès dans la manière que j’avais préférée à toutes les autres : une action simple et toute nue, un très-petit nombre de personnages, un vers brisé et assez capricieusement coupé pour se refuser à la monotonie du cantilène. Je choisis donc tout exprès l’Antigone, que je regardais comme l’une des moins passionnées, et me dis à part moi que si elle avait le bonheur de réussir, à plus forte raison réussiraient les autres, pleines d’entraînement et de variété dans la passion. La noble compagnie accueillit avec plaisir la proposition d’essayer mon Antigone ; mais comme parmi ces acteurs, un seul alors était capable de jouer dans une tragédie un rôle principal, le duc de Ceri, frère de la duchesse de Zagarolo, dont j’ai parlé, je me vis dans la nécessité de prendre le rôle de Créon ; je laissai celui d’Hémon au duc de Ceri ; sa femme prit celui d’Argia ; le rôle capital d’Antigone revenait de droit à la belle duchesse de Zagarolo. Ces quatre rôles distribués, la pièce fut jouée. Je n’ajouterai rien sur l’issue de ces représentations, n’ayant saisi que trop souvent l’occasion d’en parler dans mes autres écrits.
Passablement enorgueilli du succès de cette re-