Page:Victor Alfieri, Mémoires, 1840.djvu/357

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spirituels que temporels, ne faut-il pas les visiter, les solliciter , les flatter, les supporter ? et certes ce n’est pas chose légère. La première fois, mon ami Gori s’était chargé à Sienne de faire pour moi ces fastidieuses démarches, et il était bien capable de les recommencer pour ces deux autres volumes. Mais, ayant désiré voir, une fois du moins, un peu de tout dans ce monde, je voulus profiter de l’occasion pour voir le sourcil d’un censeur et la gravité pétulante d’un réviseur ; et certes il y aurait eu une ample matière à rire, pour un cœur moins triste que n’était le mien.

Ce fut aussi alors pour la première fois que je m’occupai moi-même de la correction des épreuves ; mais j’avais l’esprit trop accablé et trop peu capable d’application pour corriger comme je l’aurais du, comme je l’aurais pu, comme je le fis plusieurs années après, en réimprimant à Paris, le style de ces tragédies. Et cependant rien ne s’y prête mieux que les épreuves de l’imprimeur, où, sur des fragmens isolés et séparés du corps de l’œuvre, l’œil aperçoit plus vite les choses qui ne sont pas assez bien dites, les obscurités, les vers mal tournés, en un mot toutes ces petites négligences qui, en se renouvelant et se multipliant, finissent par faire tache. En somme, et de l’avis même des malveillans, ces six nouvelles tragédies furent jugées beaucoup plus pures que les quatre premières. Je fis très-bien alors de ne pas joindre les quatre qui restaient aux dix que je venais d’imprimer, entre autres la Conjuration des Pazzi et la Marie Stuart, qui dans les cir-