de la déclamation, et si j’avais eu plus de jeunesse et aucune autre pensée en tète, j’aurais pu réussir ; car je croyais sentir se développer en moi, chaque fois que je déclamais, plus de capacité, plus d’audace, plus d’intelligence ; chaque fois je gagnais quelque chose dans la gradation des tons et dans l’importante variété des mouvemens, tour à tour lents ou rapides, doux ou forts, calmes ou passionnés, qui, venant toujours prêter force à l’expression, colorent la parole, sculptent, pour ainsi parler, le personnage, et gravent en bronze ce qu’il dit. Chaque jour aussi, la compagnie que j’exerçais s’améliorait à mon exemple ; et je demeurai alors plus que convaincu que si j’avais eu de l’argent, du temps et de la santé à gaspiller, j’aurais pu, en trois ou quatre ans, former une société d’acteurs dramatiques, sinon excellente, du moins toute différente de celles qui, en Italie, vont usurpant ce titre, et dirigée sur le chemin du beau et du vrai.
Ce passe-temps me fit encore laisser fort en arrière mes occupations habituelles, pendant toute cette année et presque la suivante, qui vit du moins ma dernière apparition sur les planches. En 1795, je fis représenter dans ma maison le Philippe II, où je remplis alternativement les deux rôles si différens de Philippe et de D. Carlos, puis encore le Saül, qui était mon personnage de prédilection, parce qu’il y a de tout dans ce caractère, de tout absolument. Il s’était formé à Pise, dans une maison particulière, une autre société d’amateurs, qui jouaient aussi le Saül. Sollicité par eux de m’y