Page:Victor Alfieri, Mémoires, 1840.djvu/459

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Les éloges de Caluso m’encouragèrent à poursuivre avec plus d’ardeur. Je revins à l’excellent exercice qui m’avait été le plus utile pour le latin et l’italien, et qui consistait à apprendre par cœur des centaines de vers de différens auteurs.

Mais dans cette même année 1798, je reçus encore d’autres lettres, et il me fallut répondre à des personnes en tout bien différentes de mon ami Caluso. La Lombardie était alors, comme je l’ai dit et comme chacun le sait, envahie par une armée française, depuis 1796. Le Piémont était chancelant. L’empereur avait conclu avec le dictateur français la paix ou plutôt la malheureuse trêve de Campo-Formio. Le pape était ébranlé, et sa Rome était occupée et en proie aux fureurs d’une servile démocratie ; tout à l’entour respirait la misère, l’indignation et l’horreur. La France avait alors pour ambassadeur à Turin, M. **....., de la classe ou du métier des gens de lettres à Paris, lequel travaillait sous main à la sublime entreprise de renverser un roi vaincu et désarmé. Au moment où je m’y attendais le moins, je reçus une lettre de cet homme, à ma grande surprise et à mon grand regret. J’insère, en guise de note, la demande et

» J’ai résolu de déposer entre vos mains, comme en un temple qui les sauve de la fortune, au moins l’indication des titres de tous les ouvrages que j’ai composés jusqu’à ce jour, le seul patrimoine qui m’appartienne véritablement, si toutefois c’est jamais là un patrimoine. Portez-vous bien.»