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Page:Victor Margueritte - La Garçonne, 1922.djvu/289

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la garçonne

si stupéfaite, que le cri, à sa bouche, expira. Le chapeau sur la tête, une main dans la poche de son pardessus, Régis était devant elle. Maigri, les yeux caves, il la contemplait d’un air hagard. Elle ne sut que balbutier :

— Comment… êtes-vous… là ?

— Je vous guette à la fenêtre, depuis que vous êtes sortie de table… Je viens vous chercher. Venez.

— Vous êtes fou !

Il avança, menaçant, en étendant sa main libre :

— Venez !

Elle comprit, à son regard de meurtre. Et, bouleversée, elle poussa un « Ah ! » si perçant que Régis, interdit, s’arrêta.

— Vous ne voulez pas ? murmura-t-il. C’est bien.

En même temps, il sortit de sa poche la main armée du browning et braqua le canon. Mais, accouru au cri de Monique, Blanchet venait de se jeter devant elle, la couvrant de son corps. Le coup partit…

Stupide, Régis vit Blanchet chanceler, et Monique, le cou balafré de sang, se pencher pour le retenir. M. et Mme Ambrat qui, chacun de leur côté, s’étaient précipités, firent irruption. L’ingénieur se rua sur Boisselot, qui, comme un enfant, se laisse désarmer. Mme Ambrat aidait Monique à étendre Blanchet sur le canapé… Riri pleurait, bruyamment, suspendue au tablier de la cuisinière, attirée par le bruit.

Le premier, M. Ambrat eut une conscience nette de la situation.

— Marie, ordonna-t-il à la servante, qui tournait comme un toton, allez vite chercher le docteur Lumet. Emmenez Riri avec vous. Il vient d’y avoir un accident.