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la garçonne

Auprès de Blanchet, évanoui, Monique sanglotait, en proie à une crise nerveuse. Mme Ambrat revenait de la salle à manger, où elle avait été prendre du vinaigre et une serviette, pour bassiner le visage du blessé. Col et gilet défaits, on voyait à travers sa chemise entr’ouverte la mince blessure, près de l’aisselle. Monique, anxieuse, guettait le souffle, sous la poitrine.

— Mais vous aussi, vous êtes touchée ! s’exclama M. Ambrat. Vous avez le cou en sang… Montrez…

— Moi, ce n’est rien !

— Montrez !

La balle, après avoir traversé l’épaule de Blanchet, en séton, avait éraflé le sommet de celle de Monique. Déchirure superficielle, dont elle n’avait même pas, dans son émotion, ressenti la douleur…

— Quelle brute ! enragea M. Ambrat.

Et seulement alors, il pensa à se retourner, justicier, contre l’assassin… Plus personne ! Rien que la chaise où Régis, une minute avant, s’était affalé… Boisselot, reprenant brusquement conscience, s’était enfui.

Sous les petits coups dont Mme Ambrat lui frappait le visage, avec sa serviette mouillée, Blanchet, après un long soupir, reprenait connaissance.

— Aïe ! fit-il en relevant la tête.

— Ne bougez pas ! dit Monique.

À genoux contre le canapé, elle avait pris, et elle serrait doucement sa main. Il ouvrit les yeux, sourit en apercevant les trois têtes penchées autour de lui et aussitôt, il les rassura.

— Ce ne doit pas très grave !… Une balle dans l’épaule… Je connais ça. On m’en a déjà extirpé