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Page:Victor Margueritte - La Garçonne, 1922.djvu/300

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la garçonne

— Ne crains rien ! tu seras aimée.

— Vous êtes si bon ! dit-elle passionnément. Il me semble que je suis dans un nid où nulle tempête ne peut plus atteindre… Nous sommes à la cime de l’arbre et, autour de nous, il y a la solitude de la forêt…


Au bout des huit jours prévus par le docteur Lumet, Georges se leva guéri. La plaie n’avait pas un instant suppuré. Les deux cicatrices se refermaient, sous le bourgeonnement de la chair nouvelle.

Autour du canapé du salon où elles exigeaient qu’il s’étendit de temps à autre, les deux femmes s’installaient. Mme Ambrat cousait, Monique bavardait :

— Non, vous n’êtes pas encore en état de rentrer à Versailles ! Vos cours peuvent encore attendre une quinzaine ! Après les vacances de Noël Au jour de l’an !… D’abord, vous êtes mon blessé ! Vous devez m’obéir.

Le vous avait, dans son intonation, la tendresse du tutoiement qu’elle n’osait pas encore, même aux heures où, librement, leurs aveux communiaient. Respect d’une convenance dont la perspicace affection de Mme Ambrat s’amusait. Croyaient-ils que leur manège d’amoureux ne sautait pas aux yeux ?

— Je suis votre blessé, c’est vrai. Mais j’ai assez compliqué comme cela l’existence de nos amis…

Mme Ambrat posa son ouvrage sur les genoux :

— Oncle Georges ! Vous nous ennuyez !

— Et puis, si bien que je me trouve ici, mes travaux, vos affaires…

— Dites que vous nous avez assez vus ! Eh bien,