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la garçonne

Monique, le visage resplendissant à travers ses larmes, laissa tomber sa main dans celle qui attendait, frémissante. Il pâlit devant l’espoir réalisé.

— Et maintenant, mes enfants, dit Mme Ambrat, je ne voudrais pas vous mettre à la porte. Mais il est trois heures, et avant que vous ne soyez à Paris… À quelle heure est votre train, Georges ?

— À quatre heures !

— C’est vrai ! dit Monique. J’avais oublié votre conférence à Nantes…

Elle se retourna vers M. Vignabos.

— Et vous, mon cher maître, je ne vous emmène pas ?

— Non, puisque Mme Ambrat me fait l’amitié de m’héberger.

— Alors, en route !… Nous n’avons que le temps !… Non, non ! exigea Monique, comme M. Vignabos et M. Ambrat faisaient mine de les accompagner…. Rentrez vite, il fait un froid !…


Maintenant, dans la voiture qui les emportait, ils restaient muets. Silence lourd de pensées !… Rayonnantes en lui, et si tumultueuses en elles, qu’elles s’entrechoquaient et jaillissaient, — désordre, allégresse, gratitude, remords, — comme un bouquet continu d’étincelles.

Ils s’en allaient dans leur enchantement, à travers la nuit de lune et les bois brumeux, dont la profondeur s’ouvrait, à la fuite éblouissante des phares…

— Ralentissez, Monique… C’est si beau !…