Page:Vidalenc - William Morris.djvu/36

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poème, mieux valait en écrire un autre. Principe discutable certes, et même dangereux, mais qui explique la spontanéité et la fraîcheur de certains de ses poèmes.

À Oxford une évolution profonde se fit dans son esprit. Il y était venu avec des tendances catholiques, il regrettait la vie religieuse intense du moyen âge et avait même songé à se faire moine pour mieux assurer son salut. Mais cette idée se modifia ; au monastère loin du monde, il ne tarda pas à substituer une sorte de société fraternelle qui agirait parmi les hommes et pour leur bien. Il se destinait à la carrière ecclésiastique non parce qu’elle était lucrative et honorée, mais parce qu’elle lui apparaissait comme la plus noble, étant celle qui permet de faire le plus de bien. Il était alors à l’âge où commence à s’affirmer la personnalité de ceux qui ont quelque valeur, car il faut désespérer de ceux qui, à vingt ans, n’ont pas au cœur l’enthousiasme et l’ardent désir de faire de grandes choses, qui acceptent sans regimber toutes les disciplines intellectuelles et se résignent à suivre sans discussion la trace de leurs aînés.

Aux vacances de 1855 Morris revint en France avec Burne-Jones et un troisième compagnon. Ils visitèrent Amiens, Beauvais, Paris, où leur indignation fut grande devant les trop nombreuses restaurations de Notre-Dame par Lassus et Viollet-le-Duc. Sans méconnaître leur science archéologique et leur habileté, Morris pensait qu’on ne doit toucher que le moins possible aux monuments du passé sous peine de détruire leur véritable individualité, qui fait leur charme. Durant ce