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CHAPITRE X.

l’expression de Geoffroy Saint-Hilaire, l’œuvre des six jours ? Hypothèse hardie qui semble seule pouvoir être opposée à celle de la filiation ininterrompue des races anciennes et modernes. Cuvier essaie d’échapper à l’une et à l’autre, en faisant succéder aux habitants de chaque contrée, d’autres races, contemporaines de ceux-ci, mais, jusque-là, exclusivement propres à d’autres régions du globe[1].

Geoffroy Saint-Hilaire n’a besoin de recourir ni à l’extrême hardiesse de la première de ces hypothèses, ni à la complication singulière de celle-ci. Il est démontré que les animaux sont variables : il l’est que des races, caractérisées par des différences de valeur spécifique et même générique, peuvent se produire sous l’influence de causes suffisamment actives et suffisamment prolongées. Donc il est possible que les espèces actuellement vivantes d’Éléphants, d’Hippopotames, de Crocodiles, soient issues

  1. Telle est la véritable doctrine de Cuvier qui, si ce n’est dans son premier Mémoire paléontologique, a toujours rejeté et combattu cette hypothèse des créations successives dont quelques auteurs persistent à le représenter comme le créateur et le soutien. Pour lui, non-seulement il expose avec la plus parfaite netteté ses vues propres dans son grand ouvrage sur les Ossements fossiles, mais il va jusqu’à dire (dans l’article Nature du Dictionnaire des sciences naturelles) : « Nous ne croyons pas même à la possibilité d’une apparition successive des formes diverses. » Le système qu’on s’obstine à attribuer à Cuvier, est donc, selon lui, non-seulement faux, mais impossible.