Page:Vigée-Lebrun - Souvenirs de Mme Louise-Elisabeth Vigée-Lebrun, tome 2.djvu/111

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pluie de cendre qui nous couvrait rendaient le sommet du mont invisible, nous montons sur nos mulets et descendons dans les laves noires. Deux tonnerres, celui du ciel et celui du mont, se mêlaient ; le bruit était infernal, d’autant plus qu’il se répétait dans les cavités des montagnes environnantes. Comme nous étions précisément sous la nuée, je tremblais, et toute notre calvacade tremblait comme moi, que le mouvement de notre marche n’attirât sur nous la foudre. Malgré ma frayeur, je ne pus m’empêcher de rire en regardant un de nos compagnons de voyage, l’abbé Bertrand. Il faut vous dire qu’il est bossu par derrière et par devant un grand manteau couvrait son âne et lui, et tous deux étaient tellement confondus ensemble, que, la petite humanité de l’abbé disparaissant, je ne voyais plus qu’un chameau.

J’arrivai chez moi dans un état qui faisait pitié : ma robe n’était que cendre détrempée ; j’étais morte de fatigue ; je me sèche et me couche fort heureusement.

Bien loin d’être dégoûtée par ce début,