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Page:Vigée-Lebrun - Souvenirs de Mme Louise-Elisabeth Vigée-Lebrun, tome 2.djvu/119

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DE MADAME LEBRUN.

de l’enfer, et cette superbe horreur nous conduisit dans un lieu de délices, sous des berceaux de vignes parfaitement cultivées, et près d’une très belle forêt de châtaigniers. Là, j’aperçus une seule petite habitation, que mon guide me dit être celle d’un ermite. L’ermite était absent ; je m’assis sur son banc, et je découvris par une percée de la forêt, la mer et les îles Cyrènes, que la vapeur du matin entourait d’un ton bleuâtre. Je croyais faire un rêve enchanteur; je me disais : la poésie est née là ! Il fallut m’arracher à ma ravissante contemplation, il nous restait encore à gravir bien autrement.

Nous arrivâmes dans une espèce de désert, bordé de ravins si profonds, que je n’osais y plonger mes yeux, et mon maudit âne s’obstinait à marcher toujours sur le bord. Ne pouvant regarder en bas, je me mets à regarder en haut, et je vois la montagne que nous avions à gravir, toute couverte d’affreux nuages noirs. Il fallait pourtant traverser cela, au risque d’être étouffée cent fois : notez de plus que le chemin