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Page:Vigneron - Portraits jaunes, 1896.pdf/21

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PORTRAITS JAUNES

filial fait défaut : ce qui est un très grand déshonneur aux yeux de tous, puisqu’on met son point d’honneur à faire beaucoup de dépenses pour célébrer la mémoire des défunts.

D’autres obstacles se rencontrent dans l’impossibilité où le chrétien est de parvenir à aucune dignité, dans la crainte des persécutions, la perte de ses biens et de sa vie[1].

Cette question de religion nous amène à dire un mot de la façon dont le missionnaire administre les chrétientés en Corée. Son district peut renfermer une soixantaine de villages disséminés sur une étendue de vingt-cinq lieues. La visite de ces localités se fait pendant l’hiver et le printemps, alors que les paysans ne sont pas trop occupés aux travaux des champs. On prend le bâton de voyage vers le commencement de novembre, pour le déposer vers le mois de mai. On serre dans un panier les ornements de messe, la boîte aux sacrements, quelques vêtements, et on part accompagné d’un domestique et d’un chrétien du village où l’on se rend ; un autre porte le panier.

Quand on arrive à l’endroit désigné on n’a pour oratoire qu’une bien modeste chambre, il est vrai, mais que les chrétiens ont tapissée partout avec du papier blanc et propre, avant l’arrivée du Père ; comme autel on se sert d’une simple planche fixée au mur. On reçoit la visite de tous les chrétiens réunis et aussitôt commence l’examen sur la lettre du catéchisme ; presque tous répondent, depuis l’enfant de douze ans jusqu’au vieillard qui en a soixante. Après on fait une courte instruction et on entend les confessions. La messe se célèbre le lendemain de bon matin. On emploie ainsi trois ou quatre jours dans un endroit, selon le nombre des chrétiens, puis on se remet en route pour un autre village. Nous passons sous silence naturellement une grande partie de la besogne, comme la visite des malades éloignés ou la préparation des païens adultes qui demandent le baptême ; on conçoit combien il y a à faire, quand on sait que le missionnaire ne peut voir les chrétiens d’une même localité qu’une fois par an. Voilà le champ de l’apôtre, voilà sa culture et

  1. Lettres du P. C***, missionnaire en Corée.