— « Comme la Terre est belle en sa rondeur immense !
La vois-tu qui s’étend jusqu’où le Ciel commence ?
La vois-tu s’embellir de toutes ses couleurs ?
Respire un jour encor le parfum de ses fleurs,
Que le vent matinal apporte à nos montagnes.
On dirait aujourd’hui que les vastes campagnes
Élèvent leur encens, étalent leur beauté,
Pour toucher, s’il se peut, le Seigneur irrité[1].
Mais les vapeurs du Ciel, comme de noirs fantômes,
Amènent tous ces bruits, ces lugubres symptômes
Oui devaient, sans manquer au moment attendu,
Annoncer l’agonie à l’Univers perdu[2][3].
Viens, tandis que l’horreur partout nous environne,
Et qu’une vaste nuit lentement nous couronne,
Viens, ô ma bien-aimée ! et, fermant tes beaux yeux.
Qu’épouvante l’aspect du désordre des Cieux[4],
Sur mon sein, sous mes bras repose encor ta tête.
Comme l’oiseau qui dort au sein de la tempête[5] ;
Je te dirai l’instant où le Ciel sourira,
Et durant le péril ma voix te parlera. »
La vierge sur son cœur pencha sa tête blonde ;
Un bruit régnait au loin, pareil au bruit de l’onde :
- ↑ Entre 88 et 89, P2, A, B, un blanc de deux on quatre lignes, C1, d’une ligne.
- ↑ Byron, C. et T., sc. 5 : Écoutez ! Écoutez ! déjà nous pouvons entendre la voix des sombres vagues de l’océan qui monte ; les vents, eux aussi, préparent leurs ailes rapides ; les nuages ont bientôt rempli leurs réservoirs ; les cataractes de l’abîme vont s’ouvrir, et le ciel va lâcher ses écluses ; tandis que l’humanité voit, sans les comprendre, tous ces redoutables signes.
- ↑ Var : P2, univers
- ↑ Var : P2, B, cieux
- ↑ Chateaubriand, Génie, 1er partie, livre V, ch. 5 : Ainsi quand nous voyons à l’entrée de la nuit, pendant l’hiver, des corbeaux perchés sur la cime dépouillée de quelque chêne,… plus ils sont bercés par les orages, plus ils dorment profondément.