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poèmes antiques et modernes
bathylle

Dryade du vieux chêne, écoute mes aveux !
Les vierges, le matin, dénouant leurs cheveux,
Quand du brûlant amour la saison est prochaine,
T’adorent ; je t’adore, ô Dryade du chêne !

ménalque

Que Liber protecteur, père des longs festins.
Entoure de ses dons tes champêtres destins.
Et qu’en écharpe d’or la vigne tortueuse
Serpente autour de toi, fraîche et voluptueuse[1].

bathylle

Que Vénus te protège et t’épargne ses maux,
Qu’elle anime, au printemps, tes superbes rameaux ;
Et si de quelque amour, pour nous mystérieuse,
Le charme te liait à quelque jeune yeuse,
Que ses bras délicats et ses feuillages verts
À tes bras amoureux se mêlent dans les airs[2].

  1. Gessner, Idas, Micon : Ô vous, branchages flexibles qui vous élevez en cintre sur ma tête, votre ombre m’inspire un saint transport… Et vous, chèvres et brebis, épargnez, ah ! épargnez le jeune lierre qui naît au pied de ce chêne : ne l’arrachez pas : qu’il monte le long de sa tige blanchâtre, et qu’il forme autour d’elle des guirlandes de verdure. Ô arbre, que jamais la foudre, que jamais les vents impétueux ne renversent ta cime élevée…
  2. Chateaubriand, Génie, 1er partie, livre V, ch. 1 : Dans ce moment même où il semble que tout est tranquille, la nature conçoit ; et ces plantes sont autant de jeunes mères tournées vers la région mystérieuse d’où leur doit venir la fécondité… Il faut des tempêtes pour marier au cèdre du Liban le cèdre du Sinaï… En mettant les sexes sur des individus différents dans plusieurs familles de plantes, la Providence a multiplié les mystères et les beautés de la nature.