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moïse

Ô Seigneur ! j’ai vécu puissant et solitaire,
Laissez-moi m’endormir du sommeil de la terre. »



Or, le peuple attendait, et, craignant son courroux[1],
Priait sans regarder le mont du Dieu jaloux[2][3] ;
Car s’il levait les yeux, les flancs noirs du nuage
Roulaient et redoublaient les foudres de l’orage[4],
Et le feu des éclairs, aveuglant les regards.
Enchaînait tous les fronts courbés de toutes parts[5][6].
Bientôt le haut du mont reparut sans Moïse. —
Il fut pleuré[7]. — Marchant vers la terre promise,
Josué s’avançait pensif, et pâlissant[8],
Car il était déjà l’élu du Tout-Puissant.


Écrit en 1822.
  1. Var : M, 1er  main. Or le peuple attendait, les yeux sur le nuage, — 2e main. Or le peuple attendait, et levait eu tremblant, — 3e main. Or le peuple attendait, et toujours à genoux,
  2. Deutér., IV, 24 : Le Seigneur votre Dieu est un feu dévorant et un Dieu jaloux. — Voir encore Exode, XX, 5, et XXXIV, 14.
  3. Var : M, Regardait en tremblant le mont du Dieu jaloux ;
  4. Var : M, Roulaient plus fortement (corr. : et redoublaient) ;
  5. Exode, XIX, 16 : Le troisième jour étant arrivé,… on commença à entendre des tonnerres et à voir briller des éclairs ; une nuée très épaisse couvrit la montagne ; la trompette sonna avec grand bruit, et le peuple qui était dans le camp fut saisi de frayeur. — Voir encore XX, 18.
  6. Var : M, 1er  main. Les rattachait au sol — 2e main. Prosternait les Hébreux
  7. Deutér., XXXIV, 8 : Les enfants d’Israël le pleurèrent dans la plaine de Moab pendant trente jours.
  8. Var : M, Josué s’avançait sous un front (corr. : pensif et) palissant, La date manque dans M, P2.