Page:Vigny - Poèmes antiques et modernes, éd. Estève, 1914.djvu/97

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
63
éloa

S’approche sans effroi lentement étendu[1] ;
Sa bouche parfumée en s’ouvrant semble éclore,
Comme la jeune rose aux faveurs de l’aurore[2],
Quand le matin lui verse une fraîche liqueur,
Et qu’un rayon du jour entre jusqu’à son cœur.
Elle parle, et sa voix dans un beau son rassemble
Ce que les plus doux bruits auraient de grâce ensemble ;
Et la lyre accordée aux flûtes dans les bois.
Et l’oiseau qui se plaint pour la première fois,
Et la mer quand ses flots apportent sur la grève
Les chants du soir aux pieds du voyageur qui rêve[3],
Et le vent qui se joue aux cloches des hameaux,
Ou fait gémir les joncs de la fuite des eaux :



« Puisque vous êtes beau, vous êtes bon, sans doute ;
» Car, sitôt que des Cieux une âme prend la route,
» Comme un saint vêtement, nous voyons sa bonté[4]
» Lui donner en entrant l’éternelle beauté[5].
» Mais pourquoi vos discours m’inspirent-ils la crainte ?
» Pourquoi sur votre front tant de douleur empreinte[6] ?

  1. Var : M1, Se présente aux baisers (corrections successivement essayées : S’incline S’étend Tombe et s’ét correction définitive : S’approche sans effroi)
  2. Var : M1, Comme la jeune rose aux baisers (1er corr. : au lever biffé 2e corr. : aux soupirs biffé)
  3. Moore, A. d. A., p. 76 : Ce fut pendant le crépuscule du soir, sur le rivage de la mer tranquille, qu’il entendit pour la première fois les sons du luth et la voix de celle qu’il aima glisser sur les eaux argentées.
  4. Var : M1, 1er main, Comme un bandeau royal, sur son front la bonté 2e main, Pure comme un matin des mondes, sa bonté 3e main, Comme un prix à des (corr. : pour ses) jours sans fautes (corr. : taches), sa bonté
  5. Var : M1, Lui donne en arrivant l’éternelle beauté.
  6. Var : M1, Cette (corr. : tant de) douleur empreinte ?