Page:Vigny - Servitude et grandeur militaires, 1885.djvu/126

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Mais réponds donc, méchant sujet ! » ajoutait-il en me secouant le bras.

Je me grattais la tête, et je disais toujours en regardant mes sabots :

« Je veux être soldat. »

La mère de Pierrette apporta un grand verre d’eau froide à monsieur le curé, parce qu’il était devenu tout rouge, et elle se mit à pleurer.

Pierrette pleurait aussi et n’osait rien dire ; mais elle n’était pas fâchée contre moi, parce qu’elle savait bien que c’était pour l’épouser que je voulais partir.

Dans ce moment-là, deux grands laquais poudrés entrèrent avec une femme de chambre qui avait l’air d’une dame, et ils demandèrent si la petite avait préparé les hardes que la reine et madame la princesse de Lamballe lui avaient demandées.

Le pauvre curé se leva si troublé qu’il ne put se tenir une minute debout, et Pierrette et sa mère tremblèrent si fort qu’elles n’osèrent pas ouvrir une cassette qu’on leur envoyait en échange du fourreau et du bavolet, et elles allèrent à la toilette à peu près comme on va se faire fusiller.

Seul avec moi, le curé me demanda ce qui s’était passé, et je le lui dis comme je vous l’ai conté, mais un peu plus brièvement.

— « Et c’est pour cela que tu veux p