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Page:Ville - Au Klondyke, 1898.djvu/88

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au klondyke
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jours, une sorte de mélancolie. Tandis que les travailleurs se courbaient vers la terre, le pic à la main, il errait à l’écart avec une taciturnité qui finit par inquiéter son ami. Mais l’esprit de ce frivole jeune homme était trop mobile pour rester longtemps sous la même influence. Les visions tristes s’effacèrent graduellement, et ce fut avec un sourire qu’il recommença à envisager l’avenir.

Il y avait un mois que l’on travaillait à fouiller la terre, et déjà les sacs s’emplissaient rapidement, quand, un jour, un cavalier accourant à toute bride, sauta à terre près du camp.

— Où est votre chef ? demanda-t-il à un matelot.

— Que lui voulez-vous ? répondit le marin, car la question avait été faite en français.

— Trêve de paroles inutiles, reprit brièvement l’inconnu. Conduisez-moi à votre chef.

Vernier, qui avait vu de loin le cavalier, s’approcha vivement.

— Le chef, dit-il, c’est moi : que me voulez-vous ?

— Je veux simplement vous prévenir que si vous ne partez pas immédiatement, vous êtes tous perdus !

Un frémissement courut parmi les matelots qui entouraient l’étranger.

— Il y a quelque temps, vous avez eu maille à partir avec des aventuriers, reprit l’inconnu.

— C’est exact, dit Vernier, mais je puis vous assurer qu’ils ne nous chercheront plus noise.

— En êtes-vous bien certain ?

— Dame ! autant qu’on peut l’être lorsqu’on a amoncelé six pieds de terre sur les cadavres de ceux que l’on a combattus.