Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/150

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coutumes de son caractère. Avec un peu d’habitude ― (ah ! vous savez ! il faut connaître une femme !) ― tout vous deviendra naturel.

La gravité d’Edison pendant cet énoncé fut tout à fait imperturbable.

― Quant à son alimentation, reprit-il…

― Vous dites ? interrompit lord Ewald, en regardant fixement, cette fois, les yeux clairs de l’électricien.

― Vous paraissez surpris, milord ? dit Edison. Est-ce que, par hasard, vous compteriez laisser mourir d’inanition cette aimable créature ? Ce serait plus qu’un homicide.

― Qu’entendez-vous par son alimentation, mon cher magicien ? dit lord Ewald. Cette fois, je l’avoue, la chose dépasse les rêves les plus fantaisistes !

― Voici la nourriture que prend, une ou deux fois la semaine, Hadaly, répondit Edison. J’ai, dans ce vieux bahut, certaines boîtes de pastilles et de petites tablettes qu’elle s’assimile fort bien toute seule, l’étrange fille ! Il suffit d’en placer une corbeille sur quelque console, à distance fixe de sa dormeuse habituelle, et de la lui indiquer, en effleurant une des perles de son collier.

C’est une enfant, en ce qui est de la terre ; elle ne sait pas. Il faut lui apprendre ; nous en sommes tous là, nous aussi. ― Seulement, elle semble à peine se souvenir. Souvent nous oublions, nous-mêmes, jusqu’à notre salut.

Elle boit dans une mince coupe de jaspe, faite pour elle, et de la même manière, strictement, que boit son modèle. Cette coupe sera pleine d’eau