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Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/371

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dort là-bas, où vous êtes : mais, ici, je me souviens d’un moi qui se nomme, depuis bien longtemps, ― Sowana. »

― Quelles assombrissantes paroles je devais entendre ce soir ! murmura, comme à lui-même, le jeune lord, après une sorte de stupeur silencieuse.

― Oui : ce serait à croire que nous sommes sur la limite d’un champ d’expériences… confinant vraiment au « Fantastique ! » reprit Edison. ― Enfin, légitime ou frivole, ce vœu bizarre m’a paru mériter d’être satisfait, ― en sorte que, dans nos causeries lointaines, je n’interpelle plus mistress Anderson que sous l’insolite dénomination qu’elle m’a notifiée.

Et ceci d’autant plus volontiers que l’être moral qui m’apparaît en mistress Anderson, à l’état de veille, et celui qui m’apparaît, dans la profondeur magnétique, semblent absolument différents. Au lieu de la femme très simple, si digne, si intelligente, même, ― mais, de vues, après tout, fort limitées, ― que je connais en elle, ― voici qu’au souffle de ce sommeil il s’en révèle une tout autre, multiple et inconnue ! Voici que le vaste savoir, l’éloquence étrange, l’idéalité pénétrante de cette endormie nommée Sowana ― qui, au physique, est la même femme ― sont choses logiquement inexplicables ! Cette dualité n’est-elle pas un phénomène stupéfiant ? Cependant, ― bien qu’à des degrés d’intensité moindre ― ce phénomène est avéré, constaté, reconnu, chez tous les sujets soumis à de sérieux magnétiseurs, et Sowana ne fait exception, grâce à son genre tout particulier de