Page:Villiers de L’Isle-Adam - Axël, 1890.djvu/196

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de feu. J’ai, sous la main, de par la Forêt, bon nombre de mineurs, — bras fermes, faces rudes, — qui se souviennent de la sujétion que subirent, aux armées, leur jeunesse, et dont leurs épaules gardent encore les sillons mal cicatrisés par le temps. Nul, hors moi seul, ne peut se rendre compte du vieux ressentiment, tout à fait glacé, qui s’endurcit, en leurs veines, alors que, le poing crispé sur leur pic, ils se perdent, au profond des souterraines galeries, en songeant à vos aimables Princes. — Être envoyés, en exécuteurs, en telle capitale, pour y guetter, entre les journalières occasions, celle où, d’une balle vive et bien ajustée, l’on peut frapper, à coup sûr, un roi, serait pour eux une ivresse ardente, la seule dont ils aient une soif telle — qu’ils l’étancheraient, volontiers, au prix convenu avec vos bourreaux. Vous admettrez bien qu’il me reste assez d’or pour les défrayer en ces entreprises, — et que l’ensemble d’un « régicide », comme on dit dans les villes, serait même assez subtilement conçu par moi pour que leur bon retour fût plus que présumable. J’ai donc tout lieu de croire encore qu’après deux ou trois de ces avertissements et coïncidences, les augustes successeurs de mes antagonistes à couronne ne troubleraient plus ma solitude… ceci d’autant mieux qu’en mon impitoyable