Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/291

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— Oh ! simple excursion d’amateur, mon cher Gérard !

En deux mots je le mis au courant de mon innocente envolée.

Bras dessus, bras dessous, nous nous éloignâmes, liant causerie, ainsi que deux vieux amis qui se retrouvent.

— Moi, me dit-il, je suis ici depuis trois jours. J’arrive de plusieurs tours du monde, et, pour l’instant, des Guyanes. J’apporte au Musée zoologique de Madrid des collections d’oiseaux-mouches, pareils à de petites pierres précieuses incrustées d’ailes ; puis des oignons de grandes orchidées du Brésil, fleurs futures, dont les couleurs et les capiteux parfums sont l’enchantement et la surprise des Européens ; puis… un trésor, mon ami !… je te ferai admirer l’objet ! — Un splendide rutilant, et… (il vaut au moins six mille francs !…)

Il s’arrêta, puis se penchant à mon oreille.

— Devine ! Ah ! ah ! devine ! ajouta-t-il d’un ton bizarre.

À ce point confidentiel de la phrase, une petite main déliée, couleur de topaze très claire, se glissant entre lui et moi, se posa comme l’aile d’un oiseau de Paradis, sur l’épaulette d’or du lieutenant. L’on se retourna.

— Catalina ! dit joyeusement M. de Villebreuse : toutes les bonnes fortunes, ce soir !

C’était une jeune fille de couleur, hier une enfant, coiffée d’un foulard feu d’où passaient, à l’entour