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Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/378

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en retirait ses bras, les dressait aussi haut que possible, offrant à la Reproduction divine le cœur au hasard arraché, et dont les fibres saignantes glissaient entre ses doigts espacés selon les rites sacerdotaux.

Le grommellement monotone des brahmes, qu’envahissait une extase, râlait autour de lui le vieil hymne de Sivâ (la grande Imprécation contre la Lumière) d’eux seuls connu. Au cesser du chant, le Pontife laissait retomber son oblation pantelante sur le feu saint qui consumait les suprêmes palpitations : et la chaude buée montait ainsi, expiatrice de la vie, le long du ventre apaisé du dieu.

Cette cérémonie, toujours occulte, était si brève, que les échos du temple ne retentissaient jamais que d’un seul grand cri.

Ce soir-là, debout sur le triple degré au delà duquel s’étalait, ainsi long-voilée, la Pierre de sacrificature, se tenait le seul habitant visible des solitudes du temple : — et l’aspect de cet homme était aussi glaçant que l’aspect de son dieu.

La géante nudité de ce vieillard aux reins ceinturés d’un haillon noir, — et dont l’ossature décharnée, flottante en une peau blanchâtre aux bruissantes rides, semblait lui être devenue étrangère, — se détachait sur l’ensanglantement des lourdes draperies.

L’impassibilité de