Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/238

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dans l’étang profond, Tullia Fabriana se baignait au milieu des eaux de cristal.

C’était bien elle ; ses longs cheveux étaient déroulés sur son dos nacré, les rayons filtrés à travers les cyprès miroitaient sur elle toute ; et elle semblait, de temps à autre, syrène fastueuse des heures noires, se ployer, avec des mouvements délicieux, dans une vapeur de diamants. Les cygnes, attirés par sa blancheur, venaient polir leurs ailes contre ses flancs et ses bras ; il se vit, lui-même, pâle et les yeux fermés, nageant auprès de la marquise, et mettant le pied sur les marches de marbre, pour sortir avec elle de l’étang.

Et la Vision continua.

Ils marchaient maintenant ensemble dans les allées. Les immenses lilas balançaient, au-dessus de leurs têtes, leurs grosses touffes humides et assombries ; l’air était embaumé par les vastes ombrages des charmilles. Ils marchaient, entrelacés, sous les regards dorés des étoiles ; les lévriers et les chevreuils réveillés venaient jouer autour d’eux à leurs pieds ; leur nudité se détachait sous les feuilles comme celle d’un couple de marbres anti-