Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/44

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ne vous figurez pas ce que je lisais de traductions dans ces petits sourires rampant comme des vipères sur les lèvres de ces beaux jeunes gens et de ces charmantes femmes ! Il m’eût suffi de prononcer deux ou trois paroles élégantes et mesurées pour faire frémir bien des éventails et pour amener le silence et la pâleur sur l’insouciante niaiserie de bien de ces figures, sachant ce que pèse leur insouciance ; mais il faut pardonner à ceux qui ne savent ce qu’ils font. Vous verrez ces galants qui se permettent de railler une noble action, en croyant se la définir, parce qu’ils en aperçoivent un côté à leur taille ! Ils sont prévenants avec les femmes, ils ont du cœur devant le danger, et point d’âme en face du ciel, de la conscience et de la création. — Belles manières, gants parfumés et moustaches fines ! — Tas d’ossements que tout cela ! Prenez deux mois de pauvreté froide pour m’évaluer ces belles dignités ! Comme vous les verriez calculer et commettre de ces bassesses incroyables, sans nom, — pour vivre ? Pas du tout ! Ils agiraient par ennui, fainéantise et lâcheté, pour se procurer le plus petit plaisir. J’ai vu cela tant de fois !… Un