Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/52

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ment aux fonctions qu’il exerce. Bref, d’un commun accord, l’homme et son idée finissent par devenir miraculeux, simplement parce que ouvrir la bouche, principe de l’événement général, est déjà un miracle. Plus l’idée est simple, plus on peut y dépenser de l’intelligence ; plus, par conséquent, elle provoque de méditations et plus on trouvera de personnes à venir séculairement y tasser leur somme d’ingénuités. Voilà toute l’histoire, ni plus ni moins, mon cher comte, croyez bien cela. Cependant, vous avouerez que s’il n’y avait pas de raison à ce que ce grand rêve s’accomplît, s’il n’avait ni loi ni but, s’il n’y avait rien au fond de toutes choses, enfin, ce serait d’une niaiserie bien mystérieuse !… N’en concluez donc pas au mépris de l’humanité, mais à la puissance de la parole humaine.

La lune brillait sur les arbres. Ses rayons, à travers le feuillage, éclairaient les deux promeneurs. Wilhelm pouvait se croire en Allemagne. Il se taisait ; il écoutait.

— Quant aux femmes, ajouta le prince Forsiani, je crois inutile de vous faire donner le soleil de plein midi sur une femme du soir, sur une gracieuse