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essais et du nouveau en matière d’enseignement que de spéculer en matière de finances. Il n’y est pas propre ; il a je ne sais quelle roideur dans la main ; c’est la rançon de sa force et de sa grandeur. L’initiative privée est hardie, active et souple. C’est l’honneur des pays libres que des associations spontanées se chargent de faire l’épreuve de toutes les idées nouvelles, et la vigueur morale d’un peuple se mesure à la part que chaque citoyen prend dans ces sortes de tentatives. La liberté n’appartient qu’à ceux qui mettent de leur âme dans beaucoup de grandes affaires et qui ont la passion de les garder sous leur main.

Voilà pourquoi je viens à vous, mon cher ami, — et je vais de même aux esprits distingués qui ne se sont pas élevés au-dessus du patriotisme et jusqu’à l’indifférence. — Je vous dis à tous : « Unissez-vous à moi dans une œuvre qui peut concourir largement au salut du pays. Fondons ensemble, offrons à nos concitoyens, ouvrons aux étrangers une Faculté libre où s’achève l’instruction des classes libérales. »

Nous serons aisément d’accord, je crois, sur les grandes vues qui doivent diriger l’exécution. Permettez-moi de développer celles qui m’ont dicté le programme que vous allez lire.

Ma première pensée a été de diminuer l’immense écart qui sépare l’homme du monde du savant et du lettré, le citoyen de l’homme politique. Le savant et le lettré forment un groupe au sommet d’une colline d’où ils découvrent les plaines sans cesse agrandies de la science ; l’homme du monde gravit avec peine un seul versant, le versant classique, et il s’arrête aux pre-