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mière pentes. – Le politique digne de ce nom a un vaste savoir expérimental qui sert de contrôle à ses principes abstraits ; le citoyen vit sur quelques lieux communs et sur l’empirisme assez pauvre qu’il puise dans la chronique quotidienne des faits, telle que les journaux la donnent. Pour que la communication soit rétablie entre deux classes si inégalement pourvues, il importe que le cadre du haut enseignement libéral soit varié et presque encyclopédique ; qu’il reste de très-peu en deçà des limites de la science constituée, et qu’il se déplace avec ces limites quand un effort de l’esprit les recule. La juste mesure, c’est que l’homme et le citoyen éclairés, sans être tenus de parler la langue du savant, de l’érudit et du politique, soient toujours en état de l’entendre. La distinction intellectuelle n’est pas plus, elle n’est pas moins que cela.

Vous reconnaîtrez aisément cette préoccupation dans la liste des quatorze cours inscrits au programme. Du droit constitutionnel à la philologie, des recherches sur l’antiquité de l’homme à l’histoire des institutions militaires, le champ que parcourt l’esprit est immense : c’est celui de la science elle-même. Je n’ai point prétendu en donner la pleine possession ; mais j’ai voulu que nos disciples n’abordent en étrangers aucune partie de la connaissance humaine.

L’éducation très-insuffisante de nos colléges et de nos écoles supérieures nous laisse dans l’ignorance de presque tous les éléments de la vie contemporaine. C’est une immense et déplorable lacune. Le moins qu’on puisse attendre d’un homme cultivé, c’est qu’il connaisse son temps. Nos colléges enseignent beaucoup de choses