Page:Viollis - Criquet, 1913.djvu/253

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
241
criquet

quant à cette grosse, au nez retroussé, avec ses bras courts et cette façon de rebondir qui gonfle ses jupes, c’est une balle de caoutchouc, un peu molle et déjà dégonflée. L’autre, en face, une jolie brune qui a une tête minuscule, des bandeaux plaqués, un nez busqué, une taille plate et pliante, on dirait une de ces longues bêtes vertes aux bras croisés qu’on appelle des mantes religieuses !

Et Criquet se déride. C’est vraiment bête, la danse ! Que serait-ce donc s’il n’y avait pas la musique ?

Criquet se bouche les oreilles. Alors, tous ces gens qui, sans raison, agitent les bras et les jambes, avancent, reculent, esquissent des gestes de marionnettes et des plongeons de pantins, s’écartent, puis tout à coup se ruent violemment les uns sur les autres, s’empoignent, tourbillonnent et sautent comme des grenouilles épileptiques, lui apparaissent si cocassement bouffons que, sa mélancolie soudain dissipée, Criquet rit de tout son cœur !

Mais elle aperçoit, appuyé de l’autre côté de la porte, un monsieur pas très grand, pas très beau, un peu voûté, vieux déjà, avec une barbiche grise en pointe et une minuscule rosette à la boutonnière, qui la regarde avec des yeux clairs, si pleins d’intérêt et de bonté, que Criquet répond aussitôt par un signe de tête complice, un sourire confiant.

— Ils sont drôles, dit-elle en indiquant du menton les couples confondus en une mêlée frénétique.