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criquet

mes histoires ; car nous étions de vrais amis, t’en souviens-tu, Camille ?

— Je me souviens toujours, Michel.

— L’an dernier, poursuivit-il, tu avais la figure jaune, maussade, les épaules voûtées, la taille large et osseuse… Tu étais laide, je t’assure.

— Je sais… Et c’est pour cela que tu me négligeais, que tu me rudoyais ? demanda-t-elle à demi-voix, avec tristesse.

— Maintenant, fit-il sans l’entendre, tu as de la lumière dans les yeux, sur les joues : ça court tout autour de ta bouche quand tu souris ; et tes cheveux ont pris cette nuance d’acajou, si rare…

— C’est tout simplement qu’ils ne flottent plus sur mes épaules : depuis qu’ils sont relevés, ils paraissent moins rouges.

— Si tu savais comme les coques de ruban noir qui les nouent sont charmantes des deux côtés de ton cou ! Mais j’aime surtout ta taille mince, souple, et ton petit pied sortant de ta jupe qui n’est plus courte et qui n’est pas tout à fait longue !

Criquet donna un souvenir rapide à la bande de toile qui, si longtemps, l’avait épaissie et raidie. Mais elle ne songea pas à confier ce secret à Michel. Celui-ci parlait toujours :

— Tu ne peux t’imaginer, disait-il, comme le temps m’a paru long, depuis ton départ ; le bachot, c’est fini. Je suis libre, je suis étudiant en médecine, et