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criquet

Aulivain : un grand, un peu chauve, avec une moustache rousse… Dans ce temps-là, je le détestais à cause de Jacques qui avait du chagrin. Maintenant, Jacques est consolé, Suzanne est contente, moi aussi. C’est comme ça, la vie… Ce monsieur a demandé Suzanne, malgré sa petite dot. Tante Éléonore crie partout qu’il fait preuve d’une générosité, d’un désintéressement inouïs, que c’est un héros ! Et elle secoue la tête d’un air plein de sous-entendus, comme si elle se demandait s’il pourra sortir quelque chose de bon d’un tel sacrifice. Moi, je trouve cela tout naturel de la part de monsieur d’Ailly : des Suzanne, on lui en donnera, même avec ses millions !

— Parbleu !… Mais tu vas être très seule après le départ de ta sœur, ma pauvre chérie. Miss Winnie s’en va, je crois ?

— Oui, elle retournera bientôt en Angleterre. Tu sais, c’est drôle, nous nous aimons bien maintenant, miss Winnie et moi. Je me suis aperçue que, sous ses allures si sèches, elle avait beaucoup de cœur. Et elle ne me considère plus comme un animal qui va mordre. Je ne l’aurais jamais cru, mais j’aurai du chagrin quand elle partira… beaucoup !

Et Criquet, philosophe, prit comme autrefois ses deux genoux entre ses bras, y posa la tête et se balança un instant.

— Avec ta mère malade, les deux garçons au lycée, ce ne sera pas gai continua Michel.