Elle fit sauter les cachets de la liasse, choisit quelques lettres, les parcourut du regard et une à une les passa à Monaldeschi, sans même lever les yeux sur lui.
Le jeune homme rougit, pâlit, puis ses traits se décomposèrent affreusement.
— Ah ! Madame, balbutia-t-il, ce n’est pas possible… Ces lettres ne sont pas de moi… On a imité mon écriture…
— Tu mens ! Tais-toi, dit Christine d’une voix basse et dure. Mais cela n’est rien. Et la machination dont tu m’as abusée, est-elle fausse également ? Le mannequin dressé dans la forêt ? L’abominable subterfuge par lequel tu m’as volé mon amour ? Toi, faquin, moi, reine de Suède.
— Ah ! je suis trahi ! s’écria le misérable avec un désespoir plein de rage.
Et grinçant des dents :
— Sentinelli, immonde coquin…
— Tu oses parler de trahison, toi, l’architraître ?
Monaldeschi se jeta aux pieds de la reine et comme Sentinelli l’avant-veille, saisit les plis de sa robe pour y cacher son visage :
— C’est vrai, je n’en ai pas le droit ! sanglota-t-il, je suis impardonnable… Mais pardonnez-moi, parce que je vous ai tout de même aimée et que vous êtes miséricordieuse !
— Relève-toi, chien, fit-elle d’un ton sec en lui arrachant sa robe et en le repoussant du pied. Te souviens-tu qu’il y a trois ans, avant mon abdication, j’ai fait trancher la tête à mon historiographe Messenius et à son fils parce qu’ils avaient publié un pamphlet contre moi ? Ne m’as-tu pas dit maintes fois qu’ils méritaient la mort ?
— Madame, je vous en conjure, écoutez-moi !
— C’est bien, parle !
Tous deux se mirent à marcher en long et en large par la galerie, lui, entremêlant les supplications aux excuses, avec des larmes et des gestes désespérés ; elle, l’écoutant avec une grande patience, sans aucun signe de colère ni de haine.
S’arrêtant enfin devant le moine, elle lui dit :