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Page:Viollis - Le secret de la reine Christine, 1944.djvu/63

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IX


Où on commence à parler mariage.


Christine demeura un instant silencieuse, courbée, les bras croisés sur la poitrine, les yeux fixés sur les belles flammes bleues et roses.

Puis se dressant d’un vif mouvement, elle entraîna son amie vers un angle de la pièce, et, ses bras enlaçant les frêles épaules d’Ebba, contempla longuement un portrait, celui d’un adolescent mince et fier : en bottes à revers et justaucorps gris d’argent, le front ombragé d’un feutre à plume rouge, il tenait une cravache d’une main et l’autre posée sur l’encolure arrondie d’un cheval. Il souriait, prêt à bondir sur sa monture, donnant une impression de jeunesse alerte, de grâce et de joie.

— Me voici à seize ans, dit-elle enfin. Trois ans avant que je te connaisse. Seize ans, l’instant le plus insouciant de ma vie ! Au physique, tu me vois : un front large et serein, les yeux bien fendus, le nez aquilin, la lèvre inférieure un peu forte, mais rouge et fraîche comme une cerise.

— Une bouche faite pour le baiser, murmura Ebba.

— Il n’en était, Dieu merci, pas question ! riposta brusquement la reine. Je ne prenais aucun soin de mon teint qui était brun et hâlé comme celui d’un garçon, ni d’ailleurs du reste de mon corps et, à la propreté et l’honnêteté près, je méprisais tout l’apanage de mon sexe.