Page:Visan – Lettres à l’Élue, 1908.djvu/73

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rant au potager cueillir un melon, je me retournais pour voir la poursuite ailée de nos ombres inégales, et lorsque nous arpentions la plaine brillante de rosée, dans l’éclat humide d’une aube de novembre, pour aller piquer, sous le soleil blanc, l’hypnotique miroir aux alouettes, je m’appliquais à mouler mes petits pieds sautillants dans la trace nette et franche de ses lourdes bottes.

— Mon père, votre longue expérience des choses et des hommes s’appuyait sur mon épaule. Vous disiez : « Voici une plante qui a soif, mais gardons-nous de lui donner à boire avant que le soleil n’ait éteint ses rayons. — La lune ronge ces murs et leur communique la lèpre. — Ne tire pas sur la tige de cette herbe, tu te couperais. — Il n’y aura pas de vin cette année, mais il sera bon. — On voit trop bien le Mont Blanc aujourd’hui ; demain il pleuvra. — Si tu jettes une allumette enflammée sur cette fourmilière, instantanément les fourmis la souffleront. — C’est le moment de dormir ; dans