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la devise Nature et Vérité[1]. L’histoire comparée des littératures vérifie le principe. Chez nous spécialement, abondent les exemples de ces réactions occasionnées par la notion de vie un instant méconnue.
Les théories de la Pléiade, condensées dans la Défense et Illustration de Du Bellay, parue en 1549, ont pour fin de substituer les beautés virginales de l’antiquité grecque retrouvées aux décrépitudes du moyen âge. Je ne veux pas qu’on me demande si cette intrusion des idées classiques outrepassa ses droits, en brisant les frontières de notre tradition
- ↑ Avant d’aller plus loin, une question redoutable surgit. Est-il vrai que toutes les écoles aient posé l’imitation de la nature en principe ? Cette objection, je la prends telle que M. Brunetière l’a formulée dans son Évolution de la poésie lyrique (t. II, p. 124 note). Taine en effet, a montré que « l’altération des rapports réels des choses », en vue d’un effet à obtenir, a été le principe essentiel de très grandes écoles. On peut se proposer de faire « plus grand », comme Michel-Ange ; « plus élégant » ou « plus drôle » que nature. Il est certain aussi que la sculpture et la musique sont plus dégagées de la nature que la peinture et la poésie. Mais qu’est-ce à dire, sinon : 1o Qu’on ne parvient à déformer la nature qu’après l’avoir longtemps maniée, et que la sublimiser, ce n’est pas la nier, mais la débarrasser d’un lierre parasite et, bien au contraire, s’en servir comme piédestal pour situer dessus l’esprit humain (homo additus naturæ) ; 2o que Michel-Ange, les Alexandrins et les caricaturistes ne modifient les rapports et dépendances mutuelles des parties d’un tout, qu’en vue de rendre plus sensible le caractère essentiel de l’objet, de mieux dégager de la nature son essence, et que l’ar-