classes, et la masse des peuples passive et précaire. J’ai vu des maisons de prince, et point de corps de nation ; des intérêts de gouvernement, et point d’intérêt ni d’esprit public ; j’ai vu que toute la science de ceux qui commandent, consistait à opprimer prudemment ; et la servitude raffinée des peuples policés m’en a paru plus irrémédiable. Un obstacle, surtout, ô génie, a profondément frappé ma pensée. En portant mes regards sur le globe, je l’ai vu partagé en vingt systèmes de culte différens : chaque nation a reçu ou s’est fait des opinions religieuses opposées ; et chacune s’attribuant exclusivement la vérité, veut croire toute autre en erreur. Or si, comme il est de fait, dans leur discordance, le grand nombre des
hommes se trompe, et se trompe de bonne foi, il
s’ensuit que notre esprit se persuade du
mensonge comme de la vérité ; et alors, quel
moyen de l’écairer ? Comment dissiper le préjugé
qui d’abord a saisi l’esprit ? Comment, surtout,
écarter son bandeau, quand le premier article de
chaque croyance, le premier dogme de toute religion,
est la proscription absolue du doute,
l’interdiction de l’examen, l’abnégation de son
propre jugement ? Que fera la vérité pour être
reconnue ? Si elle s’offre avec les preuves du
raisonnement, l’homme pusillanime récuse sa
conscience ; si elle invoque l’autorité des puissances
célestes, l’homme préoccupé lui oppose une autorité
du même genre, et traite toute innovation de