n’eurent plus de base dans so entendement. Sous un tel régime, les peuples tombèrent dans le désespoir et l’accablement. Et les accidens de la nature s’étant joints aux maux qui les assaillaient, éperdus de tant de calamités, ils en reportèrent les causes à des puissances supérieures et cachées ; et parce qu’ils avaient des tyrans sur la terre, ils en supposèrent dans les cieux ; et la superstition aggrava les malheurs des nations.
Et il naquit des doctrines funestes, des
systèmes de religion atrabilaires e
misanthropiques, qui peignirent les dieux méchans
et envieux comme les despotes. Et pour les
appaiser, l’homme leur offrit le sacrifice de toutes
ses jouissances : il s’environna de privations,
et renversa les lois de la nature. Prenant ses
plaisirs pour des crimes, ses souffrances
pour des expiations, il voulut aimer la
douleur, abjurer l’amour de soi-même ; il
persécuta ses sens, détesta sa vie ; et une
morale abnégative et anti-sociale plongea
les nations dans l’inertie de la mort.
Mais parce que la nature prévoyante avait doué le
coeur de l’homme d’un espoir inépuisable, voyant
le bonheur tromper ses desirs sur cette terre, il
le poursuivit dans un autre monde : par une
douce illusion, il se fit une autre patrie, un
asyle, où, loin des tyrans, il reprit les droits
de son être ; et de là résulta un nouveau désordre :
épris d’un monde imaginaire, l’homme méprisa
celui de la nature : pour des espérances
chimériques, il négligea la réalité. Sa vie ne
fut plus à se