Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome04.djvu/227

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Narbas

Quels coups auraient comblé ses malheurs inouïs ?

Isménie

Le coup le plus terrible : on a tué son fils.

Narbas

Son fils Égisthe, ô dieux ! Le malheureux Égisthe !
Nul mortel en ces lieux n'ignore un sort si triste.  
Son fils ne serait plus ?

Isménie

Un barbare assassin
Aux portes de Messène a déchiré son sein.

Narbas

Ô désespoir ! ô mort que ma crainte a prédite !
Il est assassiné ? Mérope en est instruite ?
Ne vous trompez-vous pas ?

Isménie

Des signes trop certains  
Ont éclairé nos yeux sur ses affreux destins.
C'est vous en dire assez ; sa perte est assurée.

Narbas

Quel fruit de tant de soins !

Isménie

Au désespoir livrée,
Mérope va mourir ; son courage est vaincu :
Pour son fils seulement Mérope avait vécu : 
Des noeuds qui l'arrêtaient sa vie est dégagée ;
Mais avant de mourir elle sera vengée :
Le sang de l'assassin par sa main doit couler ;
Au tombeau de Cresphonte elle va l'immoler.
Le roi, qui l'a permis, cherche à flatter sa peine ;
Un des siens en ces lieux doit aux pieds de la reine
Amener à l'instant ce lâche meurtrier,
Qu'au sang d'un fils si cher on va sacrifier.
Mérope cependant, dans sa douleur profonde,
Veut de ce lieu funeste écarter tout le monde.

Narbas, s'en allant. 

Hélas ! S'il est ainsi, pourquoi me découvrir ?
Aux pieds de ce tombeau je n'ai plus qu'à mourir.