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204 DIALOGUE DE PÉGASE ET DU VIEILLARD. [ioh]

De quoi viens-tu flatter le déclin de mon âge?

La jeunesse est maligne et la vieillesse est sage.

Le sage en sa retraite, occupé de jouir,

Sans ciierclier les humains, et pourtant sans les fuir,

Ne s'embarrasse point des bruyantes querelles

Des auteurs ou des rois, des moines ou des belles.

Il regarde de loin sans dire son avis,

Trois États polonais doucement envahis ;

Saint Ignace dans Rome écrasé par saint Pierre,

Ou Clément dans Paris acharné sur Le Mierre.

Dans ses champs cultivés, à l'abri des revers,

Le sage vit tranquille, et ne fait point de vers.

Monsieur l'abbé Terray, pour le bien du royaume.

Préfère un laboureur, un prudent économe,

A tous nos vains écrits, qu'il ne lira jamais.

Triptolème est le dieu dont je veux les bienfaits.

Un bon cultivateur est cent fois plus utile

Que ne fut autrefois Hésiode ou Virgile.

Le besoin, la raison, l'instinct doit nous porter

A faire nos moissons plutôt qu'à les chanter ;

J'aime mieux t'atteler toi-même à ma charrue.

Que d'aller sur ton dos voltiger dans la nue.

Erreurs de Nonotte. Il commence par reprocher à l'auteur de VEssai sur les mœurs et l'esprit des nations, d'avoir dit que Vignorance chrétienne regarde le règne des empereui's romains comme une Saint-Bartbclemy continuelle; et l'au- teur n'a point dit cela. Nonotte, pour rendre odieux celui qu'il attaque, ajoute de sa grâce ce mot chrétienne. L'auteur ne parle point là des autres empereurs; il parle du seul Dioclétien que Galérius engagea à être persécuteur après dix-neuf ans d'un règne de douceur et de tolérance. Sur quoi l'auteur avait remarque la faute qu'ont faite tous les chronologistes de placer l'ère des martyrs la première année de ce règne ; il la fallait dater de l'an 303, et non de l'an 284.

Il fait dire à l'auteur que Dioclétien ne punit que quelques chrétiens, qui étaient des hommes brouillons, emportés, et factieux. L'auteur n'a pas dit un mot de cela, et n'a pu le dire. 11 n'a pas assez oublié sa langue pour se servir do cette expression, hommes brouillons.

Nonotte accuse l'auteur d'avoir dit que Charlemagne n'était qu'un heureux brigand. L'auteur n'a rien écrit de semblable. Ainsi voilà en deux pages trois calomnies dont ce bon Nonotte est convaincu. M. Damilaville daigna prendre le soin de relever deux ou trois cents erreurs de Nonotte. Elles sont imprimées à la suite de ïEssai sur les mœurs et l'esprit des nations. Et Nonotte était tout étonné qu'on lui manquât ainsi de respect, à lui qui avait eu l'honneur de prêcher dans un village de Franche-Comté, et de régenter en sixième. L'orgueil a du bon ; et quand il est soutenu par l'ignorance, il est parfait. {Note de M. de Morza, 1774.)

— Il était tout naturel que Voltaire parlât souvent de Nonotte; c'est ce qu'il a fait.

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