Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome10.djvu/364

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Par l’esprit et par le courage.
Les traits du Richelieu coquet,
De cette aimable créature,
Se trouveront en miniature
Dans mille boîtes à portrait
Où Macé mit votre figure[1].
Mais ceux du Richelieu vainqueur,
Du héros soutien de nos armes,
Ceux du père, du défenseur
D’une république en alarmes,
Ceux de Richelieu son vengeur,
Ont pour moi cent fois plus de charmes.
Pardon, je sens tous les travers
De la morale où je m’engage ;
Pardon, vous n’êtes pas si sage
Que je le prétends dans ces vers :
Je ne veux pas que l’univers
Vous croie un grave personnage.
Après ce jour de Fontenoy,
Où, couvert de sang et de poudre,
On vous vit ramener la foudre
Et la victoire à votre roi[2] ;
Lorsque, prodiguant votre vie,
Vous eûtes fait pâlir d’effroi
Les Anglais, l’Autriche, et l’Envie,
Vous revîntes vite à Paris
Mêler les myrtes de Cypris
À tant de palmes immortelles.
Pour vous seul, à ce que je vois,
Le Temps et l’Amour n’ont point d’ailes,
Et vous servez encor les belles,
Comme la France et les Génois.



  1. J.-B. Macé, peintre, mort en 1767, que Voltaire a déjà nommé dans la scène vi de l’Indiscret : voyez tome 1er  du Théâtre, page 256. (B.)
  2. Voltaire, dans son Précis du siècle de Louis XV (chap. xv), fait honneur au duc de Richelieu du conseil de faire avancer quatre pièces de canon contre la colonne anglaise ; ce qui décida la victoire. C’était, dit-on, un simple grenadier français qui en avait donné l’idée au duc de Richelieu. (B.)