Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome12.djvu/523

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
513
DU CONCILE DE TRENTE.

si ce défenseur de la Transylvanie contre les Turcs fut assassiné par les ordres de Ferdinand Ier, frère de Charles V. Enfin Sarpi et Pallavicini ont tous deux dit la vérité d’une manière différente, l’un en homme libre, défenseur d’un sénat libre ; l’autre en jésuite qui voulait être cardinal.

Dès l’an 1533, Charles V proposa la convocation de ce concile au pape Clément VII, qui, encore effrayé du saccagement de Rome et de sa prison, craignant que le prétexte de sa bâtardise n’enhardît un concile à le déposer, éluda cette proposition, sans oser refuser l’empereur. Le roi de France François Ier proposa Genève pour le lieu de l’assemblée, précisément dans le temps qu’on commençait à prêcher la réforme dans cette ville (1540). Il est bien probable que si le concile se fût tenu dans Genève, le parti des réformés y eût beaucoup perdu.

Pendant qu’on diffère, les protestants d’Allemagne demandent un concile national, et se fondent dans leur réponse au légat Contarini sur ces paroles expresses : « Quand deux ou trois seront assemblés en mon nom, je serai au milieu d’eux. » On leur accorde que cet article est certain ; mais que, si dans cent mille endroits de la terre, deux ou trois personnes sont assemblées en ce nom, cela pourrait produire cent mille conciles, et cent mille confessions de foi différentes : en ce cas il n’y aurait eu jamais de réunion, mais aussi il n’y eût peut-être jamais eu de guerre civile. La multitude des opinions diverses produit nécessairement la tolérance.

Le pape Paul III, Farnèse, propose Vicence ; mais les Vénitiens répondent que le divan de Constantinople prendrait trop d’ombrage d’une assemblée de chrétiens dans le territoire de Venise. Il propose Mantoue ; mais le seigneur de cette ville craint d’y recevoir une garnison étrangère ; (1542) enfin il se décide pour la ville de Trente, voulant complaire à l’empereur, dont il avait très-grand besoin : car il espérait alors d’obtenir l’investiture du Milanais pour son bâtard Pierre Farnèse, auquel il donna depuis Parme et Plaisance.

(1545) Le concile est enfin convoqué par une bulle, « de l’autorité du Père, du Fils, du Saint-Esprit, des apôtres Pierre et Paul, laquelle autorité le pape exerce en terre » : priant l’empereur, le roi de France, et les autres princes, de venir au concile. Charles V témoigne son indignation de ce qu’on ose mettre un roi à côté de lui, et surtout un roi allié des musulmans, après tous les services rendus par l’empereur à l’Église. Il oubliait le pillage de Rome.