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OTHON Ier, DIT LE GRAND.

Un petit-fils de Marozie, nommé Octavien Sporco, fut élu pape à l’âge de dix-huit ans par le crédit de sa famille. Il prit le nom de Jean XII en mémoire de Jean XI, son oncle. C’est le premier pape qui ait changé son nom à son avénement au pontificat. Il n’était point dans les ordres quand sa famille le fit pontife. C’était un jeune homme qui vivait en prince aimant les armes et les plaisirs.

On s’étonne que, sous tant de papes scandaleux, l’Église romaine ne perdît ni ses prérogatives ni ses prétentions ; mais alors presque toutes les autres Églises étaient ainsi gouvernées ; les évêques, ayant toujours à demander à Rome ou des ordres ou des grâces, n’abandonnaient pas leurs intérêts pour quelques scandales de plus ; et leur intérêt était d’être toujours unis à l’Église romaine, parce que cette union les rendait plus respectables aux peuples, et plus considérables aux yeux des souverains. Le clergé d’Italie pouvait alors mépriser les papes ; mais il révérait la papauté, d’autant plus qu’il y aspirait : enfin, dans l’opinion des hommes, la place était toujours sacrée, quoique souillée.

Les Italiens appellent enfin Othon à leur secours. Ils voulaient, comme dit Luitprand, contemporain, avoir deux maîtres pour n’en avoir réellement aucun. C’est là une des principales causes des longs malheurs de l’Italie.

961. Othon, avant de partir pour l’Italie, a soin de fait élire son fils Othon, né d’Adélaïde, roi de Germanie, à l’âge de sept ans : nouvelle preuve que le droit de succession n’existait pas. Il prend la précaution de le faire couronner à Aix-la-Chapelle par les archevêques de Cologne, de Mayence, et de Trêves, à la fois. L’archevêque de Cologne fait la première fonction : c’était Brunon, frère d’Othon.

Il passe les Alpes du Tyrol, entre encore dans Pavie, qui est toujours au premier occupant. Il reçoit à Monza la couronne de Lombardie[1].

962. Pendant que Bérenger fuit avec sa famille, Othon marche à Rome ; on lui ouvre les portes. Il se fait couronner empereur par le jeune Jean XII, auquel il confirme quelques prétendues donations qu’on disait faites au pontificat par Pepin le Bref, par Charlemagne, et par Louis le Faible. Mais il se fait prêter serment de fidélité par le pape sur le corps de saint Pierre, qui n’a pas été plus enterré à Rome que Pepin, Charles, et Louis, n’ont

  1. Voyez page 231.