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ANNALES DE L’EMPIRE.



PHILIPPE Ier,
vingt-quatrième empereur.

1198. D’abord les seigneurs et les évêques assemblés dans Arnsberg, en Thuringe, accordent l’administration de l’Allemagne à Philippe, duc de Souabe, oncle de Frédéric II, mineur, reconnu déjà roi des Romains. Ainsi le véritable empereur était Frédéric II ; mais d’autres seigneurs, indignés de voir un empire électif devenu héréditaire, choisissent à Cologne un autre roi ; et ils élisent le moins puissant pour être plus puissants sous son nom. Ce prétendu roi ou empereur, nommé Bertold, duc d’une petite partie de la Suisse, renonce bientôt à un vain honneur qu’il ne peut soutenir. Alors l’assemblée de Cologne élit le duc de Brunsvick, Othon, fils de Henri le Lion. Les électeurs étaient le duc de Lorraine, un comte de Kuke, l’archevêque de Cologne, les évêques de Minden, de Paderborn ; l’abbé de Corbie, et deux autres abbés moines bénédictins.

Philippe veut être aussi nommé empereur ; il est élu à Erfort[1] : voilà quatre empereurs en une année, et aucun ne l’est véritablement.

Othon de Brunsvick était en Angleterre, et le roi d’Angleterre Richard, si indignement traité par Henri VI, et juste ennemi de la maison de Souabe, prenait le parti de Brunsvick. Par conséquent le roi de France Philippe-Auguste est pour l’autre empereur Philippe.

C’était encore une occasion pour les villes d’Italie de secouer le joug allemand. Elles devenaient tous les jours plus puissantes ; mais cette puissance même les divisait. Les unes tenaient pour Othon de Brunsvick, les autres pour Philippe de Souabe. Le pape Innocent III restait neutre entre les compétiteurs. L’Allemagne souffre tous les fléaux d’une guerre civile.

1199-1200. Dans ces troubles intestins de l’Allemagne on ne voit que changements de parti, accords faits et rompus, faiblesse de tous les côtés. Et cependant l’Allemagne s’appelle toujours l’empire romain.

L’impératrice Constance restait en Sicile avec le prince Frédéric son fils : elle y était paisible, elle y était régente, et rien ne

  1. Erfurth. Voyez pages 266 et 322.