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ANNALES DE L’EMPIRE.

L’empereur remporte une victoire complète. Ottocare est tué dans la bataille le 26 août. Le vainqueur use de sa victoire en législateur. Il laisse la Bohême au fils du vaincu, le jeune Venceslas, et la régence au marquis de Brandebourg.

1278. Rodolphe fait son entrée à Vienne, et s’établit dans l’Autriche. Louis, duc de Bavière, qui avait plus d’un droit à ce duché, veut remuer pour soutenir ce droit ; Rodolphe tombe sur lui avec ses troupes victorieuses. Alors rien ne résiste ; et on voit ce prince, que les électeurs avaient appelé à l’empire pour y régner sans pouvoir, devenir en effet le conquérant de l’Allemagne.

1279. Ce maître de l’Allemagne est bien loin de l’être en Italie. Le pape Nicolas III gagne avec lui sans peine ce long procès que tant de pontifes ont soutenu contre tant d’empereurs. Rodolphe, par un diplôme du 15 février 1279, cède au saint-siége les terres de la comtesse Mathilde, renonce au droit de suzeraineté, désavoue son chancelier qui a reçu l’hommage. Les électeurs approuvent la même année cette cession de Rodolphe. Ce prince, en abandonnant des droits pour lesquels on avait si longtemps combattu, ne cédait en effet que le droit de recevoir un hommage de seigneurs qui voulaient à peine le rendre. C’était tout ce qu’il pouvait alors obtenir en Italie, où l’empire n’était plus rien. Il fallait que cette cession fût bien peu de chose, puisque l’empereur n’eut en échange que le titre de sénateur de Rome ; et encore ne l’eut-il que pour un an.

Le pape vint à bout de faire ôter cette vaine dignité de sénateur à Charles d’Anjou, roi de Sicile, parce que ce prince ne voulut pas marier son neveu avec la nièce de ce pontife, en disant que, « quoiqu’il s’appelât Orsini, et qu’il eût les pieds rouges, son sang n’était pas fait pour se mêler au sang de France. »

Nicolas III ôte encore à Charles d’Anjou le vicariat de l’empire en Toscane. Ce vicariat n’était plus qu’un nom, et ce nom même ne pouvait subsister depuis qu’il y avait un empereur.

La situation de Rodolphe en Italie était (à ce que dit Girolamo Briani) semblable à celle d’un négociant qui a fait faillite, et dont d’autres marchands partagent les effets.

1280. L’empereur Rodolphe se raccommode avec Charles de Sicile par le mariage d’une de ses filles. Il donne cette princesse, nommée Clémence, à Charles Martel, petit-fils de Charles. Les deux mariés étaient presque encore au berceau.

Charles, au moyen de ce mariage, obtient de l’empereur l’investiture des comtés de Provence et de Forcalquier.