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FRÉDÉRIC D’AUTRICHE.



FRÉDÉRIC D’AUTRICHE,
TROISIÈME DU NOM,
trente-neuvième empereur.


1440. On s’assemble à Francfort, selon la coutume, pour le choix d’un roi des Romains. Les états de Bohême, qui étaient sans souverain, jouissent avec les autres électeurs du droit de suffrage, privilége qui n’a jamais été donné qu’à la Bohême.

Louis, landgrave de Hesse, refuse la couronne impériale. On en voit plusieurs exemples dans l’histoire. L’empire passait depuis longtemps pour une épouse sans dot, qui avait besoin d’un mari très-riche.

Frédéric d’Autriche, duc de Stirie, fils d’Ernest, qui était bien moins puissant que le landgrave de Hesse, n’est pas si difficile.

Dans la même année, Albert, duc de Bavière, refuse la couronne de Bohême, qu’on lui offre ; mais ce nouveau refus vient d’un motif qui doit servir d’exemple aux princes. La veuve de l’empereur, roi de Bohême et de Hongrie, duc d’Autriche, venait d’accoucher d’un posthume nommé Ladislas. Albert de Bavière crut qu’on devait avoir égard au sang de ce pupille, il regarda la Bohême comme l’héritage de cet enfant. Il ne voulut pas le dépouiller. L’intérêt ne gouverne pas toujours les souverains. Il y a aussi de l’honneur parmi eux, et ils devraient songer que cet honneur, quand il est assuré, vaut mieux qu’une province incertaine[1].

À l’exemple du Bavarois, l’empereur Frédéric III refuse aussi la couronne de Bohême. Voilà ce que fait l’exemple de la vertu. Frédéric III ne veut pas être moins généreux que le duc de Bavière. Il se charge de la tutelle de l’enfant Ladislas, qui devait, par le droit de naissance, posséder la basse Autriche, où est Vienne, et qui était appelé au trône de la Bohême et de la Hongrie par le choix des peuples, qui respectaient en lui le sang dont il sortait.

  1. M. Clogenson pense que les dernières phrases de cet alinéa sont une allusion aux efforts inutiles du roi de Prusse, en 1744, pour dépouiller Marie-Thérèse et son fils, encore au berceau, du royaume de Bohême. Ces phrases se trouvent dans la première édition des Annales, qui parut dans l’année même de l’aventure de Francfort : ce qui explique ce trait contre ce monarque. (B.)