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MAXIMILIEN.

non-seulement ses prétentions sur le duché de Bourgogne, mais aussi l’Artois, et le Charolais, et d’autres domaines. On a peine à croire qu’un tel traité fût sérieux. Si Louis XII mariait la princesse, il perdait la Bretagne ; s’il rompait le mariage, il perdait la Bourgogne. On ne pouvait excuser de telles promesses que par le dessein de ne les pas tenir. C’était sauver une imprudence par une honte[1].

1505. La reine de Castille, Isabelle, meurt[2]. Son testament déshérite son gendre Philippe, père de Charles de Luxembourg, et Charles ne doit régner qu’à l’âge de vingt ans ; c’était pour conserver à Ferdinand d’Aragon, son mari, le royaume de Castille.

La mère de Charles de Luxembourg, Jeanne, fille d’Isabelle, héritière de la Castille, fut, comme on sait, surnommée Jeanne la Folle. Elle mérita dès lors ce titre. Un ambassadeur d’Aragon vint à Bruxelles, et l’engagea à signer le testament de sa mère.

1506. Accord entre Ferdinand d’Aragon et Philippe. Celui-ci consent à régner en commun avec sa femme et Ferdinand ; on mettra le nom de Ferdinand le premier dans les actes publics, ensuite le nom de Jeanne, et puis celui de Philippe : manière sûre de brouiller bientôt trois personnes ; aussi le furent-elles.

Les états de la France, d’intelligence avec Louis XII et avec le cardinal d’Amboise[3], s’opposent au traité qui donnait madame Claude et la Bretagne à la maison d’Autriche. On fait épouser cette princesse à l’héritier présomptif de la couronne, le comte d’Angoulême, depuis François Ier. Charles VIII avait eu la femme de Maximilien ; François Ier eut celle de Charles-Quint.

Pendant qu’on fait tant de traités en deçà des Alpes, que Philippe et Jeanne vont en Espagne, que Maximilien se ménage partout, et épie toujours l’héritage de la Hongrie, les papes poursuivent leur nouveau dessein de se faire une grande souveraineté par la force des armes. Les excommunications étaient des armes trop usées. Le pape Alexandre VI avait commencé ; Jules II achève ; il prend Bologne sur les Bentivoglio, et c’est Louis XII,

  1. Anne de Bretagne, femme de Louis XII, avait conservé de l’amitié pour Maximilien, qui l’avait défendue contre la France. Elle haïssait le comte d’Angoulême et sa mère, et les conseillers bretons auraient voulu empêcher l’union de la Bretagne à la France, sachant bien qu’ils défendraient plus aisément les priviléges de la province, ou plutôt ceux de la noblesse, contre les rois d’Espagne que contre les rois de France. La faiblesse de Louis XII pour sa femme fut la seule cause de ce traité, que la politique fit violer bientôt. (K.)
  2. 26 novembre 1504.
  3. Voyez tome XII, page 193.