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ANNALES DE L’EMPIRE.

royaume de Naples pour sûreté de l’argent qu’ils avaient prêté autrefois.

Le roi de Hongrie se déclarait aussi, espérant avoir la Dalmatie. Le duc de Savoie mettait la main à cette entreprise à cause de ses prétentions sur le royaume de Chypre. Le duc de Ferrare, vassal du saint-siége, en était aussi. Enfin, hors le grand Turc, tout le continent de l’Europe veut accabler à la fois les Vénitiens.

Le pape Jules II avait été le premier moteur de cette singulière ligue des forts contre les faibles, si connue par le nom de Ligue de Cambrai ; et lui, qui aurait voulu fermer pour jamais l’Italie aux étrangers, en inondait ce pays.

Louis XII a le malheur de battre les Vénitiens à la journée de Ghiara d’Adda d’une manière complète. Cela n’était pas bien difficile. Les armées mercenaires de Venise pouvaient bien tenir contre les autres condottieri d’Italie, mais non pas contre la gendarmerie française.

Le malheur de Louis XII, en battant les Vénitiens, était de travailler pour l’empereur. Maître de Gênes et de Milan, il ne tenait qu’à lui de donner la main aux Vénitiens pour fermer à jamais l’entrée de l’Italie aux Allemands.

La crainte de la puissance de Venise était mal fondée. Venise n’était que riche ; et il fallait fermer les yeux pour ne pas voir que les nouvelles routes du commerce par le cap de Bonne-Espérance et par les mers de l’Amérique allaient tarir les sources de la puissance vénitienne.

Louis XII, pour surcroît, avait encore donné cent mille écus d’or à Maximilien, sans lesquels cet empereur n’aurait pu marcher de son côté vers les Alpes.

Le 14 juin 1509, l’empereur donne dans la ville de Trente l’investiture du Milanais, que le cardinal d’Amboise reçoit pour Louis XII. Non-seulement l’empereur donne ce duché au roi ; mais, au défaut de ses héritiers, il le donne au comte d’Angoulême François Ier. C’était le prix de la ruine de Venise.

Maximilien, pour ce parchemin, avait reçu cent soixante mille écus d’or. Tout se vendait ainsi depuis près de trois siècles. Louis XII eût pu employer cet argent à s’établir en Italie : il s’en retourne en France après avoir réduit Venise presque dans ses seules lagunes.

L’empereur avance alors du côté du Frioul, et retire tout le fruit de la victoire des Français. Mais Venise, pendant l’absence de Louis XII, reprend courage : son argent lui donne de nouvelles armées. Elle fait lever à l’empereur le siége de Padoue : elle se