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FERDINAND III.

côtés, moins elle est décisive. L’empereur retire en hâte ses troupes de la Hongrie, et traite avec Racoczi pour empêcher les Français d’aller à Vienne par la Bavière, tandis que les Suédois menaçaient d’y aller par la Moravie.

Il est à croire que dans ce torrent de prospérités des armes françaises et suédoises, il y eut toujours un vice radical qui empêcha de recueillir tout le fruit de tant de progrès. La crainte mutuelle qu’un des deux alliés ne prît trop de supériorité sur l’autre, le manque d’argent, le défaut de recrues, tout cela mettait un terme à chaque succès.

Après la célèbre bataille de Nordlingue, on ne s’attendait pas que les Autrichiens et les Bavarois regagneraient tout d’un coup le pays perdu par cette bataille, et qu’ils poursuivraient jusqu’au Necker l’armée victorieuse, où Condé n’était plus, mais où était Turenne. De telles vicissitudes ont été fréquentes dans cette guerre.

Cependant l’empereur, fatigué de tant de secousses, pense sérieusement à la paix. Il rend la liberté enfin à l’électeur de Trêves, dont la prison avait servi de prétexte à la déclaration de guerre de la France ; mais ce sont les Français qui rétablissent cet électeur dans sa capitale. Turenne en chasse la garnison impériale ; et l’électeur de Trêves s’unit à la France, comme à sa bienfaitrice. L’électeur palatin eût pu lui avoir les mêmes obligations ; mais la France ne faisait encore pour lui rien de décisif.

Ce qui avait fait principalement le salut de l’empereur, c’était la Saxe et la Bavière, sur qui le fardeau de la guerre avait presque toujours porté. Mais enfin l’électeur de Saxe, épuisé, fait une trêve avec les Suédois.

Ferdinand n’a donc plus pour lui que la Bavière. Les Turcs menaçaient de venir en Hongrie : tout eût été perdu. Il s’empresse de satisfaire Racoczi, pour ne se pas attirer les armes ottomanes. Il le reconnaît prince souverain de Transylvanie, prince de l’empire, et lui rend tout ce qu’il avait donné à son prédécesseur Bethlem-Gabor. Il perd ainsi à tous les traités, et presse la conclusion de la paix de Vestphalie, où il doit perdre davantage.

1646. Le pape Innocent X était le premier médiateur de cette paix, dans laquelle les catholiques devaient faire de si grandes pertes. La république de Venise était la seconde médiatrice. Le cardinal Chigi, depuis le pape Alexandre VII, présidait dans Munster au nom du pape ; Contarini, au nom de Venise. Chaque puissance intéressée faisait des propositions selon ses espérances et ses craintes ; mais ce sont les victoires qui font les traités.