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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome14.djvu/150

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ÉCRIVAINS FRANÇAIS

tion. Les hommes comprendront, dit-il, qu’il suffit de la patience, de la politesse, et de la bienfaisance, pour plaire à Dieu. Il est impossible, dit-il encore, qu’un livre où l’on trouve des propositions fausses données comme vraies, des choses absurdes opposées au sens commun, des louanges données à des actions injustes, ait été révélé par un être parfait. Il prétend que dans cinq cents ans tous les esprits, jusqu’aux plus grossiers, seront éclairés sur ce livre ; que le grand muphti même et les cadis verront qu’il est de leur intérêt de détromper la multitude, et de se rendre plus nécessaires et plus respectés en rendant la religion plus simple. Ce traité est curieux[1]. Dans ses Annales de Louis XIV, il dit que l’État devrait bâtir des loges aux petites-maisons pour les théologiens intolérants, et qu’il serait à propos de jouer ces espèces de fous sur le théâtre.

[2] C’est ici l’occasion d’observer que l’auteur du Siècle de Louis XIV n’a donné cette liste des écrivains et des artistes qui ont fleuri sous Louis XIV qu’après avoir vu leurs ouvrages, et souvent connu leurs personnes, recherchant tous les moyens de s’instruire sur ce siècle célèbre, depuis qu’il fut nommé historiographe de France. Il ne pouvait, dans cette liste, parler des Annales politiques[3] de l’abbé de Saint-Pierre sous Louis XIV, puisque le Siècle fut imprimé en 1752 pour la première fois, et que les Annales de l’abbé de Saint-Pierre ne parurent qu’en 1758, ayant été imprimées en 1757. Ces Annales, il le faut avouer, sont une satire continuelle du gouvernement de ce monarque, qui méritait plus d’estime ; et cette satire n’est pas assez bien écrite pour faire pardonner son injustice. La famille de l’abbé, sentant quel dangereux effet cet ouvrage pouvait produire, engagea son auteur à le dérober au public : il ne fut imprimé qu’après sa mort. Comment donc l’abbé Sabatier, natif de Castres, qui a donné depuis la liste des écrivains de Trois Siècles[4], a-t-il pu dire que « l’auteur du Siècle de Louis XIV en a puisé l’idée mal remplie dans ces Annales politiques qui offrent un tableau frappant des progrès de l’esprit chez notre nation » ?

Premièrement, il est impossible que l’auteur du Siècle ait pu

  1. Ce qui précède est de 1763. La phrase dernière de l’alinéa fut ajoutée en 1768. (B.)
  2. Toute la fin de l’article fut ajoutée en 1775. (B.)
  3. Voyez, dans les Mélanges, le treizième des Fragments sur l’histoire, intitulé Défense de Louis XIV contre les Annales politiques de l’abbé de Saint-Pierre.
  4. La première édition des Trois Siècles de la littérature française, par Sabatier de Castres, est de 1772, trois volumes in-8o.